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Jygatech : l’aventure allemande

Quand on a une bonne idée, autant l’exporter non ? C’est en tout cas le choix d’Alain Lefebvre, vice-président de Jyga Technologies. L’entreprise de Saint-Nicolas, qui produit Gestal FM notamment, technologie d’alimentation informatisée pour enclos de mise-bas pour les porcs, a décidé, en plein coeur de la crise qui sévissait en Europe, d’aller voir en Allemagne si leurs machines pouvaient se faire une place sur le marché du vieux continent. Bien leur en a pris, car depuis, on parle d’ une véritable percée pour Jyga Technologies en pays teuton. Nous voulions en savoir plus.

Pourquoi vous-êtes vous dirigés sur l’Allemagne en particulier ?

Cela nous semblait l’endroit idéal pour centraliser nos ventes européennes. L’Allemagne nous permet aisément de toucher l’Europe de l’est et la Russie et constitue une économie solide. De plus, les coûts de transport en Europe, contrairement à ce que l’on pourrait penser, sont moindres, selon moi, grâce à la proximité des pays. Il est aisé d’atteindre des marchés présentant des différences notables et des opportunités variées, qui ne sont distants que de quelques centaines de kilomètres. En avion, du Québec, si je veux envoyer deux représentants développer le marché américain proche, cela me coûtera plus de 750 dollars d’avion par représentant, alors qu’en Europe, j’ai envoyé deux représentants prendre l’avion dans toute l’Europe pour qu’ils tissent des liens d’affaires et leur voyage entier n’a pas coûté cette somme. C’est un atout certain.

Comment avez vous approché ce pays ?

On a commencé à faire de l’exportation il y a trois ans, et on s’est rendu compte que le marché européen ressemblait beaucoup au marché américain, au niveau de ses connaissances et dans sa manière d’évaluer la production et de la contrôler. On a donc décidé de se concentrer la dessus à la fin 2012, et ciblé l’Europe comme un marché prometteur, alors que la crise était plus forte à l’époque. Après quelques tatonnements, on s’est rendu compte qu’il devenait difficile de fonctionner avec un simple distributeur, en raison du décalage horaire notamment, donc il nous fallait quelqu’un sur place.

Nous avons eu la chance de rencontrer la personne idéale, un allemand qui avait de l’expérience à profusion et qui ne souhaitait pas déménager. Nous l’avons rencontré dans une foire commerciale, nous communiquions avec lui. Il était très au fait du milieu de l’agriculture porcine, qui est un petit milieu. On s’est rendu compte que cela fonctionnait mieux d’avoir quelqu’un de la région avec des fournisseurs locaux  et on l’a recruté définitivement au tout début de 2014.

Comment votre responsable des affaires en Allemagne travaille avec les distributeurs sur place ?

Son travail, c’est de s’assurer que les distributeurs effectuent la bonne marche à suivre et assurer un suivi avec les clients. Il faut donc que ceux-ci puissent bien démontrer que le plus-value du produit. Étant donné que c’est un produit qui n’est pas simple à vendre, malgré son potentiel, on a eu beaucoup de soumissions, mais il n’y avait pas de suivi quand on travaillait uniquement avec des distributeurs à distance. Si on n’allait pas les voir dans les six mois, il n’y avait moins de retour, désormais, avec notre employé sur place, cela fonctionne beaucoup mieux.

Le marché européen des produits agricoles peut sembler saturé vu de l’autre côté de l’Atlantique, comment votre entreprise s’est démarquée ?

Nous avons un produit unique, c’est donc l’innovation qui attire les clients, au départ. Il s’agit d’ un système d’alimentation de truies qui est entièrement informatisé, il n’y a donc plus besoin de personne pour les nourrir. On a surtout des concurrents indirects, et quelques concurrents directs qui arrivent juste cette année. C’est donc par notre innovation mais également par notre expérience que l’on a pu se démarquer, ce qui est important en Allemagne, c’est une maîtrise d’ensemble. On sait répondre à toutes les questions qu’ils peuvent se poser : Comment nourrir les porcs ? Etc… C’est le mélange d’un savoir faire technique et informatique. Plusieurs personnes pensaient à tort que notre système faisait ce que font les systèmes traditionnels, mais désormais, ils comprennent mieux notre atout.

Vous vendez dans toute l’Europe à partir de l’Allemagne ?

On vend en France, en Angleterre, en Norvège, au Danemark, en Italie, en Espagne et en Russie. Cette dernière est très prometteuse. Il y a un réel potentiel car le marché est énorme, il y a une nouvelle vague de création de fermes et un besoin par conséquent de systèmes à haute productivité pour vite atteindre la rentabilité. Le porc se vend très bien là-bas donc cela attire les projets.

Avez-vous eu des surprises avec l’implantation de votre structure en Allemagne ?

On cherchait des avocats franco-allemands spécialisés dans l’ouverture d’entreprises avec des actionnaires étrangers, on a trouvé une compagnie parfaite via Expansion Québec, avec un service impeccable. Pour le côté allemand il n’y avait aucun problème, mais par contre, on avait peu d’information sur les papiers à fournir au niveau canadien. Tout d’abord, il fallait des documents à transmettre au notaire pour l’envoyer par la suite au consulat. Mais par la suite, on a appris par le consulat qu’une étape de plus était en fait nécessaire, ce qui a ralenti la démarche de trois semaines. Il faut donc calculer avec un mois et demi de délai de plus, selon moi, pour déclarer sa filiale fonctionnelle car les délais sont importants et il y a beaucoup de papiers à remplir.

Comment sont perçues les entreprises du Québec en Allemagne selon vous ?

Nous avons bonne réputation, et les allemands sont habitués de travailler avec des compagnies d’outre-mer, ils comprennent donc les délais de livraison inhérents à l’international. D’autre part, on fait surtout affaire avec des compagnies, et non avec des particuliers, donc la plupart du temps, nos interlocuteurs connaissent nos façons de travailler.

Avez-vous senti des différences dans la manière de faire des affaires en Allemagne ?

C’est parfois difficile d’avoir l’information exacte lorsqu’on représente une entreprise étrangère, mais je ne pense pas que cela soit propre à l’Allemagne. Même si on est servis par quelqu’un qui parle parfaitement français ou anglais, il peut arriver, notamment en traitant avec des banques, que la personne attitrée aux entreprises étrangères n’ait pas toujours toutes les données en main, et cela nécessite donc des intermédiaires. D’où l’intérêt de laisser un employé allemand sur place : il aura l’information tout de suite dans sa langue.

Un conseil pour les entreprises qui souhaiterait venir se développer sur le marché allemand ?

Avant tout, anticiper les lourdeurs administratives au niveau bancaire et gouvernemental. Il faut montrer une preuve du passeport, une certification de la banque d’ici, pour engager les démarches, cela peut prendre du temps, et le fait que nous soyons une entreprise étrangère les rend plus précautionneux, ce qui est compréhensible.